Les États-Unis ont promis ce lundi 5 novembre d'exercer une pression "implacable" pour faire plier l'Iran, qui entend "contourner avec fierté" les sanctions draconiennes rétablies par Washington contre les secteurs pétrolier et financier iraniens.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a dévoilé la liste des huit pays autorisés, pendant encore six mois au moins, à continuer d'acheter du pétrole à Téhéran : la Chine, l'Inde et la Turquie (les premiers importateurs de brut iranien avec l'Union européenne), ainsi que le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, l'Italie et la Grèce. De telles dérogations, au motif que ces pays se sont engagés à continuer de réduire leurs achats, avaient déjà été octroyées par la précédente administration démocrate de Barack Obama de 2012 à 2015. L'administration de Donald Trump, qui a claqué la porte en mai de l'accord de 2015 censé empêcher l'Iran de fabriquer la bombe atomique, a fini ce 5 novembre de rétablir la salve des sanctions qui avaient été levées après sa signature.

En dépit des dérogations accordées, l'actuel gouvernement républicain maintient sa pression et réaffirme l'objectif de ramener à zéro les exportations iraniennes de brut, qui assurent 40 % des recettes de l'État iranien. Elles ont déjà baissé d'environ un million de barils par jours (mbj) depuis mai, pour s'établir à 1,6 mbj en septembre. Washington a énoncé 12 conditions pour parvenir avec la République islamique à un  accord qu'elle estime "plus complet" et qui comprendrait des restrictions beaucoup plus dures sur le programme nucléaire, la prolifération de missiles et un interventionnisme jugé "déstabilisateur" au Moyen-Orient.

Le président iranien Hassan Rohani a promis lui, dans un discours télévisé, de "contourner avec fierté" ces "sanctions illégales et injustes". "Nous sommes en situation de guerre économique et nous affrontons une tentative d'intimidation. Je ne pense pas que dans l'histoire américaine il y ait eu jusqu'à présent quelqu'un à la Maison Blanche qui contrevienne à ce point au droit et aux conventions internationales", a-t-il rétorqué.

Le week-end a été l'occasion d'une ping pong de joutes verbales entre les dirigeants de part et d'autre. Le 3 novembre, le guide suprême d'Iran Ali Khamenei a accusé Donald Trump d'avoir "discrédité" les Etats-Unis qui, selon lui, seront les ultimes perdants de cette politique. "L'Iran va mal", a répliqué le président américain, qui pense imposer aux dirigeants iraniensla méthode appliquée à la Corée du nord - pression maximale puis négociations et réconciliation -, afin de négocier un nouvel accord. "La confiance mutuelle n'est pas une condition préalable pour entamer des négociations, mais le respect mutuel en est", a estimé le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif dans un entretien au quotidien USA Today, estimant que Washington doit changer son "approche" pour relancer la diplomatie.

L'Europe, en juge de paix

Malgré une économie en difficulté, de nombreux experts estiment que l'Iran va pour l'instant résister, d'autant que, contrairement à la période pré-2015, les États-Unis sont assez isolés. Les Européens, pourtant alliés des Américains, tiennent à préserver un accord sur le nucléaire qu'ils jugent indispensable à la sécurité mondiale, et, pour éviter que Téhéran ne le quitte à son tour et relance la course à l'arme atomique, promettent de l'aider à contourner les sanctions. "Nous allons faire tout le nécessaire pour préserver et élargir la coopération économique, commerciale et financière avec l'Iran en dépit des sanctions américaines", a aussi réagi le ministère russe des Affaires étrangères.

Pour rappel, depuis ce 5 novembre, toutes entreprises asiatiques ou européennes qui continuent d'importer du pétrole iranien, ou d'échanger avec des banques iraniennes ciblées par Washington, se verront interdites de marché américain si elles . Beaucoup ont déjà choisi les États-Unis et quitté l'Iran. Concernant les sanctions financières, quelque 700 individus et entités en Iran ont été placés lundi sur la liste noire américaine, bien davantage que ceux qui en avaient été retirés après l'accord de 2015. Parmi eux, 50 banques iraniennes, plus de 200 personnes et navires des secteurs iraniens du transport maritime et de l'énergie, une compagnie aérienne iranienne et plus de 65 de ses avions. L'administration Trump souhaite aussi déconnecter l'Iran du circuit bancaire international Swift, ossature du système financier mondial, comme c'était le cas de 2012 à 2016.

--- La rédaction (avec agences) ---