
En invitant fermement l’autorité de régulation maritime américaine à resserrer les contrôles sur les pratiques des transporteurs maritimes opérant sur la route transpacifique, l’administration de Joe Biden a ouvert une boîte de Pandore. Après les exportateurs agricoles, ce sont les importateurs de produits chimiques qui s’estiment traités avec discrimination par les transporteurs.
Les dépôts de plaintes se muliplient et le mécontentement se structure par filières. Après les exportateurs agricoles, ce sont les importateurs de produits chimiques qui accusent les transporteurs de pratiques discriminatoires en refusant d’embarquer leur fret.
Depuis qu’elle a été fermement invitée par le nouvel exécutif américain à renforcer son contrôle sur les transporteurs qui contreviendraient à la réglementation sur le transport maritime, la Federal Maritime Commission (FMC) accuse réception des doléances des chargeurs. La loi américaine – le Shipping Act (qui pourrait être amendée) interdit aux transporteurs « de refuser déraisonnablement de traiter des marchandises » et leur assigne « d'appliquer des pratiques justes et raisonnables concernant la réception et la livraison du fret. »
Sous la pression des chargeurs, l’administration de Joe Biden a récemment demandé au régulateur américain du transport maritime de renforcer les contrôles et d’auditer les neuf plus grands transporteurs maritimes afin d'évaluer leur respect aux règles sur la détention et la surestarie. Le programme d'audit s’ajoute aux enquêtes lancées en 2020 portant notamment sur les prix du transport.
États-Unis : l'environnement réglementaire se durcit pour le transport maritime
Des allégations contestées par les compagnies incriminées
La Chine, le Vietnam et la Corée du Sud ont ouvert des procédures similaires alors que les exploitants de porte-conteneurs sont portés par des taux de fret record depuis des mois mais tout en offrant un service dégradé. Le niveau de fiabilité horaire des navires n’a jamais été aussi faible.
Les tensions sont particulièrement vives outre-Atlantique. Durant l’été, MCS Industries, un fabricant d’articles de la maison pour de grandes enseignes américaines, a accusé MSC et Cosco de ne pas avoir respecté ses engagements contractuels – des allégations vivement contestées par les transporteurs, notamment MSC, qui pourraient à leur tour porter plainte pour parjure et diffamation. Un dossier dont les conclusions ne seront pas rendues avant de très longs mois.
« Refus systémique de transporter les marchandises »
Dans la nouvelle plainte auprès de la FMC, il s’agit du transport de matières dangereuses. « Ce sont des produits chimiques qui ne sont plus fabriqués dans le pays mais dont les composants entrent dans la fabrication d’un large éventail de biens dits stratégiques pour le pays ou essentiels pour des raisons sanitaires », a expliqué Carl Bentzel, commissaire à la FMC. En clair, une pénurie pourrait mettre en péril l'industrie américaine. De ce fait, le régulateur a fait savoir qu’une enquête allait être lancée afin de déterminer s’il font l’objet d’un « refus systémique de transporter les marchandises ». Celle-ci pourrait s’inscrire dans les programmes d’audits en cours.
Le commissaire se dit conscient « des défis fondamentaux que représente le traitement de l'offre et de la demande dans un environnement de transport congestionné » mais rappelle que les marchandises dangereuses ne peuvent pas faire l'objet d'une discrimination précisément en raison même de la nature de ce fret.
Adeline Descamps